En dépit d’une forte opposition locale, le ministère japonais de la Défense a entamé, le vendredi 14 décembre, les travaux de comblement sur le littoral de Henoko (Nago-shi, Okinawa) en vue d’y délocaliser la base américaine de Futenma.
Les travaux ont commencé le jour même, vers 11h du matin, à Heneko, sur la côte est de l’île principale de la préfecture d’Okinawa. Un premier camion a vidé son chargement, que des bulldozers ont ensuite étalé. Selon FNN, les travaux en cours représentent 4% des 6,3 hectares qui à terme devront être comblés. Ce projet s'inscrit dans la perspective du transfert de la base américaine de Futenma située dans une zone urbaine densément peuplée du sud de l’île. L’État avait suspendu fin octobre le pouvoir préfectoral de révocation. La reprise des travaux aggrave la tension entre la préfecture et le gouvernement.
(Pour en savoir plus sur ce point, cliquez le lien ci-contre : https://hebdojapon.wixsite.com/actualites-japon/blog/okinawa-le-pr%C3%A9fet-s-oppose-%C3%A0-la-d%C3%A9cision-de-l-%C3%A9tat-d-imposer-la-reprise-des-travaux-%C3%A0-henoko )
Les opposants au transfert expriment ouvertement leur mécontentement et dénoncent non seulement une débâcle environnementale, mais également le fait que Tokyo ignore leur souhait de voir supprimer la base en question. Des dizaines de personnes dans des canots pneumatiques ont protesté en brandissant des pancartes sur lesquelles il était inscrit : « Ne tuez pas l’océan » ; « Aucune base militaire n’est nécessaire pour les enfants d’Okinawa ». De nombreux habitants d’Okinawa pensent que la présence d’un si grand nombre de soldats américains sur l’île est déjà un lourd fardeau, et souhaitent que la base aérienne de Futenma soit déplacée hors de la préfecture d'Okinawa.
M. Denny Tamaki – actuel gouverneur d’Okinawa, élu fin septembre pour empêcher les travaux de Henoko et réduire le nombre des bases américaines sur l’île, mais aussi première personne de parenté américaine à occuper un tel poste – avait visité Washington et New York le mois dernier pour obtenir le soutien du public et des responsables américains. Les États-Unis, quant à eux, considèrent que le différend doit être réglé entre Tokyo et Okinawa. A l’égard de L’État japonais, le gouverneur a commenté : « N’est-il pas important de reconnaître qu’avec la reprise des travaux [malgré la forte opposition], la colère des habitants d’Okinawa ne peut que s’intensifier ? ». « Le gouvernement force le comblement et ne prête même pas la moindre attention à la volonté du peuple d’Okinawa », a-t-il ajouté. Il s’était rendu à plusieurs reprises à Tokyo, en exhortant les hauts responsables du cabinet du Premier ministre Shinzo Abe à reporter les travaux et à dialoguer. Dans sa conférence de presse, il a qualifié l’exécution des travaux « d’illégale ».
A Tokyo, les responsables gouvernementaux ont déclaré que le plan de relocalisation à Henoko est le seul envisageable et qu’il le resterait malgré les protestations. « Afin de maintenir l'aspect dissuasif de l’alliance nippo-américaine et d’éliminer les risques liés à la base aérienne de Futenma, son transfert à Henoko est la seule solution », a déclaré le Secrétaire général du Cabinet, Yoshihide Suga. Il a ajouté que le gouvernement s’efforcerait de réduire le fardeau d’Okinawa vis-à-vis de l’accueil des troupes américaines. Cependant, l’opposition reproche à Shinzo Abe d’avoir ordonné la reprise des travaux. Tetsuro Fukuyama, un haut responsable du Parti démocrate constitutionnel (PDC) a déclaré : « [La reprise des travaux] est loin de la démocratie. (…) Le gouvernement Abe n’a aucune compassion pour Okinawa, ni pour le respect de la légalité, ni pour la volonté du peuple ».
Ce projet lancé en 2010 consiste à construire deux pistes en forme de V, qui devraient être achevées en 2022 pour remplacer celles de la base de Futenma après sa fermeture. Takeshi Iwaya, le ministre japonais de la Défense, a déclaré que les retards se sont accumulés suite aux multiples manifestations et que la fermeture de Futenma à la date prévue semblait difficile. La relocalisation de Futenma a été décidée après le viol d’une écolière en 1995, enflammant l’opposition d’Okinawa à l’égard de la présence militaire américaine. Trois militaires américains ont été condamnés pour cette affaire.
La préfecture d’Okinawa représente 0,6% de la superficie totale du Japon, mais abrite 75% des bases américaines dans le pays, dont 18% sur la plus grande des îles. Des 47 préfectures du pays, Okinawa abrite la plus importante présence militaire américaine, soit plus de 23 000 hommes en 2014.
Sources : FNN, Time, Asahi Shinbun, Kyodo News, Nippon TV
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