Les discussions ont eu lieu mardi 22 janvier à Moscou entre le Premier ministre japonais et le président russe, sans pour autant parvenir à résoudre le différend territorial qui perdure depuis plus de sept décennies.
Après leur vingt-cinquième tête-à-tête, de plus de trois heures, au Kremlin ce mardi 22 janvier, Shinzo Abe et Vladimir Poutine ont à nouveau échoué à mettre un terme à cette aberration historique entre le Japon et la Russie. Depuis la capitulation japonaise en 1945, les deux pays n’ont toujours pas conclu un traité de paix en raison de leur contentieux relatif aux Territoires du Nord, appelés les Kouriles du Sud en Russie. A l’issue de ces nouveaux pourparlers, les dirigeants japonais et russes ont insisté sur le fait que les conditions préalables à tout accord devraient être acceptables par les populations respectives, et que les discussions se prolongeraient au niveau des ministres des Affaires étrangères, Taro Kono et Sergeï Lavrov, le mois prochain à Munich.
« Nous avons discuté sans dissimuler l’un de l’autre », a déclaré le Premier ministre japonais à l’issue de ces nouveaux pourparlers. Quant au président russe, il a affirmé que « ces discussions étaient très constructives ». Les deux dirigeants, essayant à chacune de leur rencontre de mettre en scène leur bonne relation, ont convenu en novembre dernier d’accélérer les négociations basées sur l’article 9 de la Déclaration commune soviéto-japonaise de 1956, dans laquelle l’Union soviétique confirmait qu’elle transfèrerait au Japon la souveraineté sur les deux plus petites îles des Territoires du Nord après la conclusion d’un traité de paix mettant officiellement fin à l’état de guerre.
Cependant, cette tentative de conclusion d’un traité de paix est contestée dans les deux pays. Selon CNN, des manifestants nationalistes russes sont descendus dans les rues de Moscou dimanche dernier, réclamant la fermeté du gouvernement au sujet de ce différend territorial. Igor Skurlatov, l’un des orateurs du rassemblement d’environ 500 personnes selon le service de sécurité de la ville, a qualifié les velléités de transfert territorial d'acte de trahison. Au parlement russe, le chef du Parti libéral démocrate, Vladimir Zhirinovskii, a déclaré que si le Japon souhaitait développer des relations bilatérales avec la Russie, il devra expulser les forces américaines de son territoire et conclure un traité de paix. « Menons des exercices militaires conjoints. Voyons ce que valent la marine japonaise et la marine russe. Nous pourrions faire débarquer des troupes sur l’une des îles japonaises, montrons comment nos hommes sont capables d'investir avec succès le sol japonais », a suggéré M. Zhirinovskii.
Le Japon quant à lui insistait depuis longtemps pour que sa pleine souveraineté sur l’intégralité des quatre îles soit confirmée avant la signature d’un traité de paix. Cependant, ces dernières années, certains signes semblent indiquer que Tokyo serait en train de réviser sa position. Celle-ci, synthétisable sous la forme « deux plus alpha », met l’accent sur le transfert de souveraineté de deux îles mineures, et la mise en place d’un accès sans visa aux îles restantes, plus importantes, où Tokyo et Moscou pourraient développer des projets économiques conjoints. Mais, à l'instar de ce qui se passe en Russie, cette nouvelle orientation est contestée par les nationalistes et par certains anciens résidents des Territoires du Nord.
Un des différends internationaux les plus anciens
Après que le Japon eut accepté la déclaration de Potsdam le 14 août 1945, les troupes soviétiques ont successivement occupé ces quatre îles du Pacifique nord-occidental les 28 août et 5 septembre de la même année, expulsant dans la foulée quelques 17 000 citoyens japonais. Selon CNN, environ 19 000 citoyens russes y résideraient aujourd’hui.
D’après le site Internet officiel du ministère japonais des Affaires étrangères, ces îles « sont partie intégrante du territoire du Japon, et n’ont jamais été contrôlées par d'autres pays. Cependant, l'occupation des Territoires du Nord par l’Union soviétique, puis la Russie, depuis 1945, est illégale ». Il ajoute enfin que le gouvernement japonais « poursuit énergétiquement ses négociations avec la Russie dans le cadre d'une politique visant à résoudre le problème de l’attribution des quatre îles du Nord et la conclusion d’un traité de paix avec la Russie ».
Sources : CNN, Sankei-Shimbun, Les Echos, Mainichi-Shimbun, Yomiuri-Shimbun, Nihon-Keizai-Shimbun
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